Dans la lignée des États-Unis, Israël
abandonnera probablement sa politique anti-cubaine, mais la route vers
une éventuelle reprise des relations bilatérales est encore longue, ont
déclaré des responsables israéliens cette semaine.
Les législateurs israéliens ont été surpris d’apprendre la nouvelle de la détente spectaculaire entre Washington et La Havane que le président américain Barack Obama a annoncé la semaine dernière.
Israël et les Etats-Unis sont les deux seuls
pays au monde qui ont toujous voté contre la levée de l’embargo
américain à l’Assemblée générale des Nations Unies.
Cet embargo dure depuis plus de 50 ans.
Des sources à Jérusalem supposent que si l’Amérique abandonne sa
politique d’opposition à la levée de l’embargo à l’Assemblée générale,
Israël fera la même chose.
« Israël soutient la politique américaine sur
Cuba dans les forums internationaux en raison du contexte d’une alliance
stratégique entre les deux pays et à cause des votes de Cuba au sujet
d’Israël dans ces forums », a expliqué le porte-parole du ministère des
Affaires étrangères, Emmanuel Nahshon au Times of Israel lundi.
« A la lumière de ces changements, nous
étudions la décision [américaine] et nous sommes en contact avec les
Autorités américaines. »
Cuba avait unilatéralement coupé ses liens
avec Israël en 1973, non en raison de la guerre du Kippour – comme on le
pense souvent à tort – mais parce que le dirigeant du pays, Fidel
Castro, avait demandé la présidence du Mouvement des non-alignés cette
année-là.
Depuis, les relations entre les deux nations
ont connu des hauts et des bas mais sont globalement restées glaciales.
En 2010, par exemple, Fidel Castro a comparé le traitement des
Palestiniens par Israël à celui des Juifs par les nazis. « Il semblerait
que la croix gammée du Führer est la bannière d’Israël aujourd’hui »,
avait déclaré à l’époque le dirigeant âgé de 83 ans.
Cette année, il a accusé Israël d’avoir commis un « génocide » à Gaza et a qualifié l’opération Bordure protectrice de « nouvelle forme répugnante de fascisme ».
Cependant, en 2010, Fidel Castro, qui a été
remplacé au poste de président par son jeune frère Raul quatre années
auparavant, a affirmé lors d’une interview accordée au journaliste
Jeffrey Goldberg qu’Israël avait « sans aucun doute » le droit d’exister en tant qu’Etat juif.
Lorsque Goldberg lui a demandé si La Havane
pourrait envisager de reprendre ses relations diplomatiques, l’aîné des
frères Castro a répondu que ces choses prenaient du temps, mais il n’a
pas rejeté catégoriquement cette idée.
Actuellement, le Canada représente les intérêts d’Israël à La Havane, y compris pour aider la communauté juive dans le pays.
Malgré l’absence de relations diplomatiques
officielles, les Israéliens font des affaires à Cuba – l’agent du Mossad
et l’ancien député Rafi Eitan, par exemple, a créé plusieurs grandes
entreprises agricoles et de construction là-bas – et y partent
régulièrement en voyage. Depuis 2003, les Juifs cubains viennent aussi régulièrement à Israël.
Dimanche soir, les cadres supérieurs du
ministère des Affaires étrangères ont discuté de l’ouverture entre
Washington et La Havane. « Nous sommes au début d’un long processus.
Nous avons encore besoin de comprendre exactement ce qui se passe aux
Etats-Unis », indique un responsable israélien bien placé, qui a accepté
de parler sous condition d’anonymat parce qu’il n’était pas autorisé à
discuter de la question avec la presse.
Ce n’était pas un secret qu’Obama cherchait à
détendre les relations avec Cuba, mais personne à Jérusalem ne pensait
que cela se produirait aussi rapidement, a expliqué le haut
fonctionnaire. Il ajoute que le gouvernement a maintenant besoin d’un
peu de temps pour comprendre la nouvelle situation et ses implications.
Il y a plusieurs processus politiques internes
aux Etats-Unis qui sont mis en œuvre actuellement, a expliqué le
responsable. La Maison Blanche a annoncé ses plans pour établir une
ambassade à La Havane, mais sans le consentement du Sénat contrôlé par
les Républicains, cela pourrait s’avérer difficile.
C’est le Congrès qui confirme chaque
nomination des ambassadeurs et l’octroi des fonds pour transformer cet
intérêt de l’administration américaine en une ambassade, a expliqué le
fonctionnaire.
« Le Sénat s’oppose à cette décision, et cela
se retourne contre Obama. Après les élections de mi-mandat, il n’est pas
sûr qu’il réussira à mettre en œuvre ce projet » de réhabiliter
totalement les relations diplomatiques avec Cuba.
Mais si les Etats-Unis abandonnent leur vote
traditionnel pour s’opposer à la levée de l’embargo de Cuba, il n’y a
aucune raison pour qu’Israël ne suive pas l’exemple américain. « Notre
vote sur cette question n’a jamais été en relation avec notre intérêt de
faire respecter l’embargo » a expliqué le fonctionnaire. « Nous l’avons
juste fait pour les Etats-Unis. »
Un autre haut fonctionnaire a confirmé cette
explication : « Ce n’est pas Cuba le problème, nous l’avons fait pour
les Etats-Unis. »
En 1992, le ministre adjoint des Affaires
étrangères de l’époque, Yossi Beilin, avait demandé au ministère des
Affaires étrangères de réexaminer la politique d’Israël pour le vote en
faveur de l’embargo.
« Je leur ai dit que l’embargo était ridicule,
d’autant plus que les Etats-Unis avaient reconnu la Chine et lui a
permis de remplacer Taiwan en tant que membre permanent du Conseil de
sécurité. Après tout, la Chine n’est pas plus libérale que Cuba et son
bilan en matière des droits de l’Homme est pire », se remémore Beilin cette semaine dans un article pour i24news.
« Il n’y a aucune logique derrière le vote
israélien contre Cuba ! Personne dans cette pièce ne peut me contredire,
et tout le monde s’accordait à dire que cela était une mesure stupide
qui n’avait aucune autre explication que de vouloir faire plaisir aux
Etats-Unis, qui n’avaient pas abandonné l’embargo. »
Beilin a posé cette question au gouvernement
du pays et a reçu une réponse, qui, admet-il, était convaincante : «
Nous recevons tant des États-Unis et tout ce qu’ils attendent de nous,
c’est que nous les soutenions à l’ONU sur Cuba. Si c’est le prix
diplomatique que nous devons payer, cela n’a aucun sens pour nous de
nous lever et d’annoncer que son seul allié sur la question est
soudainement passé dans l’autre camp. »
Maintenant que Barack Obama a décidé de
changer une « politique ridicule et pathétique », Israël arrêtera de
voter contre une résolution qu’elle soutient en réalité, affirme Beilin.
Remerciant le président d’avoir libéré Israël
de devoir « voter stupidement à l’ONU dans le but de ne pas irriter
Washington », Beilin a déploré le fait qu’Obama n’ait pas reconnu le
soutien solitaire de longue date d’Israël à la position américaine à
l’ONU. « Il est vrai que les États-Unis font la même chose pour nous,
mais nous, nous nous
en rappelons. »
Dans les premières années après la révolution socialiste de Cuba en 1959, les relations bilatérales étaient – en réalité – assez amicales. En 1961, pour la première fois dans l’Histoire, une mission diplomatique israélienne permanente a été ouverte à La Havane, selon la professeur de l’Université hébraïque de Jérusalem Margalit Bejarano.
en rappelons. »
Dans les premières années après la révolution socialiste de Cuba en 1959, les relations bilatérales étaient – en réalité – assez amicales. En 1961, pour la première fois dans l’Histoire, une mission diplomatique israélienne permanente a été ouverte à La Havane, selon la professeur de l’Université hébraïque de Jérusalem Margalit Bejarano.
« Les dirigeants cubains, dont certains ont
reçu leurs premières leçons de communisme de leurs amis juifs,
admiraient l’esprit pionnier d’Israël et considéraient le kibboutz comme
étant un modèle à suivre », a-t-elle écrit dans Haaretz vendredi.
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